Le projet DEMiCCAC a été sélectionné dans le cadre de l’appel à projets 2013 du Programme d’Excellence pour l’Enseignement et la Recherche au Sud (PEERS) de l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD). Le projet associe des enseignants-chercheurs de l’université du Maine au Mans (département de géographie) et des enseignants-chercheurs de l'université de Yaoundé 1 (département de géographie). Il est mis en œuvre dans le cadre d’une convention tripartite (IRD/Université du Maine/Université de Yaoundé 1).
L’objectif du projet est de construire des connaissances sur la mise en œuvre de la Réduction des Émissions de gaz à effet de serre résultant de la Déforestation et de la Dégradation des forêts (REDD+) au Cameroun, et plus globalement en Afrique centrale. Il s’agit de mener des recherches sur la dimension géographique de la REDD+, en évaluant et en analysant les décisions et les mesures de gestion forestière qui sont susceptibles d’entrainer la baisse de la déforestation au Cameroun, avec une approche comparative à l’échelle du bassin du Congo. Les recherches se focalisent sur les effets territoriaux de la REDD+, et examinent le lien entre réduction de la déforestation et atténuation du changement climatique, en s’intéressant au stockage du carbone dans des espaces où la déforestation aurait été évitée ou réduite du fait de la mise en œuvre de la REDD+.
L'Afrique centrale est une région phare pour les démarches institutionnelles Nord-Sud relatives à la REDD+ : Programme REDD+ et Fonds Carbone de la Banque Mondiale, Programme REDD+ des Nations unies, Fonds de Partenariat pour les Forêts du Bassin du Congo, etc. Ces démarches soutiennent les pays de l’Afrique centrale dans l’élaboration et la mise en œuvre de leurs stratégies nationales REDD+. Dans cette optique, des projets pilotes foisonnent, impliquant une diversité d'acteurs (États, ONG, organismes de commercialisation du carbone, populations locales, etc.). Face à cet engouement pour la REDD+, on peut s’interroger sur la pérennité et l’efficacité à long terme de ce mécanisme, et parallèlement sur les dynamiques territoriales qui en découlent.
Le projet DEMiCCAC envisage de produire un bilan analytique et une prospective territorialisée de la REDD+ au Cameroun, en esquissant des comparaisons avec d’autres pays de l’Afrique centrale (Gabon, République Démocratique du Congo, République du Congo).
Trois pistes de recherche sont privilégiées :
- Les changements d’occupation du sol et les dynamiques territoriales résultant de la REDD+ ;
- La réalité, la quantification et le suivi de la déforestation évitée (le Monitoring, Reporting and Verification, et le rôle de la télédétection).
- Les facteurs et les conditions de l’appropriation, de la gouvernance et de l’efficacité de la REDD+.
Parallèlement aux activités de recherche scientifique, le projet alimentera des enseignements pour le Master "Dynamiques de l'Environnement et Risques », à l'université de Yaoundé 1 (département de géographie), ainsi que des séminaires pour des doctorants (école doctorale sciences humaines et sociales à l’université de Yaoundé 1). Il est envisagé de créer un Master en Enseignement à Distance, portant sur la transition énergétique et la durabilité dans le contexte de l’Afrique centrale, en codiplomation entre l’université du Maine et l’université de Yaoundé 1.
Questions générales La REDD+ est-elle une solution efficace au problème de déforestation et de dégradation forestière, en particulier dans le bassin du Congo ? Quelles sont les contraintes, les faiblesses, les insuffisances éventuelles de la REDD+ ? Comment la lutte contre la déforestation, par la REDD+, contribue t-elle localement à la mitigation du changement climatique ? Comment mesurer et rendre compte continuellement de la déforestation évitée et des émissions de gaz à effet de serre associées à cette déforestation évitée? Quel est l’état des projets pilotes REDD+ au Cameroun et ailleurs en Afrique centrale ? Quels enseignements peut-on tirer de ces projets pilotes?
Questions spécifiques DEMICCAC Quels sont/seront les effets territoriaux de la REDD+ et les implications pour l’aménagement du territoire et la gestion des forêts? Quelle est/sera la réalité de la déforestation évitée et ses retombées en termes d’atténuation du changement climatique? Quelle cohérence du niveau national au niveau sous-régional pour quelle homogénéisation des MRV à l’échelle du bassin du Congo? Quelle capacité de mise en œuvre efficace de la REDD+?
Méthodes de recherche
Axe 1. Les changements d’occupation du sol et les dynamiques territoriales résultant de la REDD+ au Cameroun Diagnostic et prospective territoriale, cartographie, simulation/modélisation spatiale, etc. Localisation et cartographie de la déforestation évitée
Axe 2. La réalité, la quantification et le suivi de la déforestation évitée
État de l’art critique de la télédétection de la REDD+, analyse comparative du MRV des pays de l’Afrique centrale à partir des R-PP, traitements d’images satellites appliqués à la REDD+, spatialisation des équations allométriques et des inventaires de carbone/biomasse
Axe 3. Les facteurs et les conditions de l’appropriation, de la gouvernance et de l’efficacité de la REDD+
Analyse des architectures REDD+ pour confronter les préconisations avec la réalité et le contexte, analyses des capacités institutionnelles et des relations entre les acteurs, synthèse bibliographique, confrontation des enseignements empiriques avec les concepts et les théories de la gouvernance, de la dépendance aux sentiers, de la fragilité de l’Etat
Responsable Nord
Moïse Tsayem Demaze, Maître de conférences HDR en géographie à l’université du Maine
Participation de:
Yamina Djellouli, professeure à l'université du Maine (séminaire de Master et de doctorat à l'université de Yaoundé 1)
Jeannine Corbonnois, professeure à l'université du Maine (séminaire de Master et de doctorat à l'université de Yaoundé 1, cours Master 2 EAD transition énergétique et durabilité en Afrique)
Cyria Emelianoff, professeure à l'université du Maine(séminaire de Master et de doctorat à l'université de Yaoundé 1, cours Master 2 EAD transition énergétique et durabilité en Afrique)
François Laurent, professeur à l'université du Maine (séminaire de Master et de doctorat à l'université de Yaoundé 1, cours Master 2 EAD transition énergétique et durabilité en Afrique)
Vincent Andreu-Boussut, Maître de conférences à l'université du Maine (séminaire de Master et de doctorat à l'université de Yaoundé 1, cours Master 2 EAD transition énergétique et durabilité en Afrique)
Responsable Sud
Paul Tchawa, professeur en géographie à l’université de Yaoundé 1, directeur du département de géographie (Cameroun)
Participation de:
Roger Ngoufo, professeur à l'université de Yaoundé 1
Joseph Youta Happi, chargé de cours à l'université de Yaoundé 1
Alternance entre 3 niveaux d’observation
- Le local (projets pilotes) au Cameroun : localité de Ngoyla-Mintom.
- Le niveau régional, suivant le découpage du Cameroun en 5 zones agro-écologiques: zone forestière à pluviométrie mono-modale, zone forestière à pluviométrie bi-modale, hauts plateaux de l'Ouest, zone soudano-sahélienne, zone de hautes savanes guinéennes (Adamaoua).
- Le national (Cameroun, République Démocratique du Congo) pour un essai de comparaison et de généralisation à l’échelle de l’Afrique centrale, notamment en ce qui concerne la gouvernance et le MRV
À l’issue de la première année de fonctionnement du projet, un article scientifique a été soumis en octobre 2014 et accepté pour publication dans Natures Sciences Sociétés, dossier spécial COP 21, volume 23, supplément 2015 (http://www.nss-journal.org/).
Du savoir vers le savoir-faire : évolution de la conception de la REDD+ et contraintes à sa mise en œuvre en Afrique centrale
Tsayem Demaze Moïse, Ngoufo Roger, Tchawa Paul
Résumé – Cet article examine les liens entre l’évolution de la conception de la REDD+ et les travaux scientifiques publiés à son sujet. Un cadre analytique, inspiré de l’étude des interactions entre sciences et politiques environnementales, et de l’analyse institutionnelle discursive, est utilisé. Trois principales phases sont distinguées. La phase pré-RED, entre 1997 et 2004, la phase RED-REDD+, entre 2005 et 2009, et la phase actuelle de préparation à la mise en œuvre dans les pays en développement. Un focus est ensuite effectué sur l’Afrique centrale, pour rendre compte de l’opérationnalisation de la REDD+. La lecture comparative des plans de préparation ne met pas en évidence un savoir-faire spécifique pour réduire ou éviter la déforestation dans les pays concernés. Multiforme, le mode opératoire révèle des incohérences entre développement économique et protection des forêts, ainsi que des difficultés pratiques soulignant la nécessité de réformes foncières et de politiques d’aménagement du territoire.
Mots-clés : changement climatique ; REDD+ ; analyse institutionnelle ; interactions science-politique publique environnementale ; Afrique centrale
Abstract – From knowledge to know-how: evolution of REDD+ design and constraints to its implementation in central Africa. This paper describes the genesis of REDD + in order to analyze the relationship between the evolution of its design and the scientific literature published about it between 1997 and 2014. An analytical framework, involving the study of interactions between science and environmental public policy, and the discursive institutional analysis, is used. Three main phases are outlined. The Pre-RED phase, between 1997 and 2004, is that of the emergence of the concept of "compensated reduction" of emissions. Phase 2, between 2005 and 2009, is that of the effective development of REDD +, with a rich scientific production. The third phase, which began in 2010, focused on REDD+ readiness, with an abundant scientific production that has started to evaluate REDD+ procedures and pilots initiatives in developing countries. The paper then reports on the preparation for REDD+ in Central Africa countries, from a comparative reading of the readiness preparation proposals. Although this preparation is stepped, the necessary or specific know-how which can help avoid or reduce deforestation is not clearly stated. This highligts the diffuse nature of REDD+ even in its operational phase. The know-how is focused more on technical aspects related to monitoring, reporting and verification (MRV). It reveals inconsistencies between economic development and forest protection, as well as practical difficulties stressing the need for land reform and land planning.
Keywords: climate change; REDD +; institutional analysis; environmental public policy and science interactions; Central Africa
S’agissant du transfert à la société civile, suite au séminaire de démarrage du projet en avril 2014, en présence des autorités officielles camerounaises (point focal REDD+ et changements climatiques au ministère de l’environnement et au ministère des forêts), le projet a été ajusté de manière à ce que les résultats aident le Cameroun dans l’élaboration de sa stratégie nationale REDD+ et dans la mise en œuvre de ce mécanisme. Les travaux de l’axe 1 du projet, réorganisés en fonction du découpage officiel du Cameroun en zones agro-écologiques, produiront des résultats susceptibles d’avoir une vocation opérationnelle. Dans l’attente de ces résultats, les porteurs du projet collaborent avec l’ensemble des acteurs (y compris les ONG et les associations) impliqués dans la mise en œuvre de la REDD+ au Cameroun. Ces acteurs ont constitué un groupe de travail qui fonctionne comme un forum d’échanges et de coopération pour s’attaquer aux problèmes auxquels le Cameroun est confronté en matière de REDD+. Les porteurs de DEMICCAC ont été sollicités et ont été inscrits comme membres de ce groupe de travail. Il associe les chercheurs, les universitaires, les ministères en charge de l’environnement et des forêts, les bailleurs de fonds et les agences de coopération (Banque Mondiale, FAO, AFD, coopération japonaise, etc.), les ONG, etc.
rapport mi-parcoursTélécharger le fichier «Rapport_2014_DEMICCAC.pdf» (2.8 MB)